Avoir un enfant qui souffre de Trichotillomanie
Publié le 9 Juin 2018
La trichotillomanie ou trichomanie, c'est quoi ? Wilkipédia dit que c'est un trouble chez l'être humain caractérisé par l'arrachage compulsif de ses propres poils et ou cheveux, entraînant une alopécie manifeste sur la partie du corps touchée.
En tant que maman d'une fille ayant souffert pendant 2 ans de trichotillomanie, je vais me permettre de vous donner MA définition.
Puce avait 16 mois. C'était presqu'encore un bébé. D'ailleurs, elle ne marchait pas encore. Et pourtant, elle a commencé à s'arracher les cheveux. Elle avait toujours la main dans les cheveux, ça paraissait mignon, une mini fille, avec plein de cheveux, qui se les tripote... Mais j'ai commencé à en retrouver sur ses draps, dans son siège auto, dans la poussette, dans la chaise haute... Pis surtout, elle a commencé à avoir des trous dans sa chevelure...
L'angoisse, le stress... Quelle est cette maladie dont nous n'avons jamais entendu parler ? Qu'est il arrivé à ma fille, mon bébé, mon enfant, pour qu'elle se fasse du mal toute seule ? Qu'avons nous fait de mal ? Quelle est cette souffrance dont elle veut nous faire part ? Elle qui est née avec une vraie tignasse, elle se rend chauve. Mais pourquoi ?
En l'observant elle et en observant les endroits où elle laissait ses cheveux, nous avons compris qu'elle le faisait quand elle se détendait ou quand elle n'avait rien d'autre à faire.
J'ai cherché sur internet. La trichotillomanie est une maladie. Certains la comparent à ceux qui se rongent les ongles, je ne sais pas vraiment pourquoi, car je pense personnellement que c'est très différent. Pour moi, s'arracher les cheveux, c'est arracher sa féminité, c'est se faire du mal, se détruire. Se ronger les ongles, c'est plus une petite habitude qui n'a pas de grande conséquence.
J'ai trouvé UN forum de discussion (vous remarquerez le UN mis en majuscule, vu le temps passé à chercher, je crois qu'il n'en existait pas d'autre, du moins à l'époque). Pour avoir le droit de lire et d'écrire dans ce forum, il fallait s'inscrire, dire pourquoi on venait. Ensuite un modérateur acceptait ou non votre inscription. Le bon côté étant que tout le monde ne pourrait pas lire vos états d'âme.
Alors, je me suis inscrite. Et j'ai lu, lu, lu, et lu encore. Ces mères qui parlaient de leur enfant, de tout ce qu'elles avaient fait ou faisaient pour les soigner. Ces enfants, devenus adultes qui parlaient de leurs parcours, de ce que leurs parents avaient fait et de ce qu'eux faisaient une fois devenus adultes.
De mes lectures en est ressorti UNE conclusion. Alors, non je ne suis pas médecin, non je ne suis pas spécialiste, mais j'ai quand même tiré UNE conclusion. Il y a les enfants dont les parents n'ont rien fait, qui se sont dit que ce n'était pas grave du tout, qui ont pensé que ça passerait tout seul (un peu comme ceux qui se rongent les ongles) : leur enfant n'a jamais arrêté et même âgé de plus de 60 ans, souffrait encore de cette maladie. Et puis, il y avait les parents qui avaient tout fait pour comprendre, pour écouter, pour soigner, pour se renseigner : et leur enfant avait arrêté.
Il était clair et net qu'il FALLAIT tout mettre en oeuvre pour notre fille.
Aujourd'hui, puce à 8 ans, alors je ne vais pas pouvoir vous dire dans quel ordre j'ai vu tous les spécialistes, peut être même que je vais oublier de vous en citer quelques uns. Veuillez m'en excuser. Je vais faire au mieux pour vous relater le plus précisément.
J'ai téléphoné à un magnétiseur, dont le numéro de téléphone m'avait été donné par une pharmacienne. J'ai dû lui envoyer une photo de ma puce, sa date de naissance, son nom, son prénom. Enfin je ne sais plus trop, à vrai dire. Suite à cela, il m'a dit que ma puce avait eu peur de l'abandon par son papa quand elle avait 8 mois et qu'il y avait beaucoup de monde, beaucoup de bruit, et qu'elle ne supportait pas le bruit depuis sa naissance, qu'elle devait d'ailleurs avoir fait beaucoup d'otites depuis sa naissance. Ce qui était vrai, d'ailleurs elle a arrêté de s'arracher les cheveux quelques temps après s'être fait opérée des végétations et parasynthèse (opération qui a d'ailleurs arrêté ses otites et fait développer son langage en 1 mois). Ceci était pour lui l'élément programmant. Ensuite, il y a eu un élément déclencheur, un épisode de bruit qui a choqué notre fille à 16 mois et c'est pour ça qu'elle a commencé à s'arracher les cheveux (l'élément déclencheur peut arriver quelques minutes ou plusieurs années après l'élément programmant, selon les personnes).
J'ai alors cherché dans ma mémoire, dans les photos. Et j'ai découvert que lorsque puce avait 8 mois, nous sommes allés à une réunion de famille, avec beaucoup de monde (peut être 200 personnes, venues de régions et de pays variés). Nous avions dû écourter la soirée car puce pleurait tout ce qu'elle pouvait (elle qui pourtant était un bébé calme, que nous n'entendions jamais pleurer). J'avais dû sortir à l'extérieur de la salle, pour la bercer et tenter de la calmer. Son papa et son frère étaient restés à l'intérieur. Ce serait donc là, qu'elle aurait eu peur de perdre son papa... Ok, j'avais trouvé l'élément programmant et c'était plus que plausible.
J'ai alors cherché l'élément déclencheur. Je suis une maman qui prend énormément de photos de mes enfants et je les range dans mon ordinateur par année, par date, par thème. Bref, une vraie collection. Je me suis donc aperçue que ma fille avait la main dans les cheveux sur plein de photos à partir du 21 avril 2011 (oui, je sais, c'est extrêmement précis). Sauf qu'en réfléchissant un peu, je me suis rendu compte que 10 jours plus tôt, soit le 11 avril 2011, c'était le jour précisément où nos travaux d'aménagement de combles (très bruyant) avaient commencé. J'essayais de sortir un maximum, pour ne pas faire subir le bruit, mais nous étions quand même parfois présents... J'avais trouvé l'élément déclencheur.
C'est bien de comprendre, mais après, on fait quoi ?
Le magnétiseur est venu à la maison, il l'a visitée, nous a parlé d'une source sous la maison, nous a fait installé des trucs pour la contrer, nous a fait changer le lit de puce de place, a fait des choses avec une "chaînette", avec puce.
Elle a vu un microkiné qui lui a fait des manipulations.
Elle a vu 2 psychologues, mais bon elle ne savait pas encore parler.
Elle a vu notre médecin traitant, des pédiatres qu'on ne connaissait pas.
Elle a vu un ostéopathe qui lui a fait des manipulations.
Je lui ai fait faire des moufles par une couturière pour lui mettre la nuit.
Et puis elle a vu un kinésiologue homéopathe acupuncteur.
Lui aussi m'a dit qu'elle avait en horreur le bruit, que cela lui était insupportable. Il lui a fait des manipulations, lui a fait prendre de l'homéopathie. Ca l'a soulagée quelques temps, un peu. Et puis ça a recommencé de plus belle.
Je suis retournée le voir plusieurs fois. Il la soulageait un peu à chaque fois.
Si vous avez lu mon récit attentivement, vous avez peut être remarqué que je dis "je" quand je parle des démarches pour la soigner. En fait, son papa n'a jamais voulu m'aider car il pensait que ce n'était rien du tout, que je m'en faisais pour rien. Je ne dis pas cela pour le critiquer, car c'est un père remarquable. Simplement, à ce moment là, j'étais seule à lutter. Alors je voulais juste dire que mon "je", c'est pas un "je" de mère possessive, c'est un "je" qui s'impose de lui même.
Nous avons été forcer de constater quelque chose : chaque fois que nous sortions voir des amis ou de la famille, et qu'il y avait du bruit, on pouvait être sûr que le lendemain matin, une partie de sa tête serait dépourvue de cheveux.
Je n'avais plus envie de sortir. Je voulais rester à la maison, avec mon enfant. Puisqu'elle ne supportait pas le bruit, il fallait l'en protéger... Mais on ne peut pas vivre dans une bulle... Aider nos enfants à grandir, ce n'est pas les préserver de tout. Ils DOIVENT se confronter au monde extérieur... Mais où l'égoïsme de vouloir une vie sociale commence-t-il ? Ou la protection de notre enfant doit elle s'arrêter ?
Nous sommes partis en gîte quelques jours avec nos meilleurs amis : 8 adultes et 8 enfants, une piscine, un grand jardin, un barbecue, des ballades dans la forêt. Le bonheur ou presque. Le bonheur, parce que nous étions avec des personnes que nous aimions, parce que l'ambiance était à la rigolade, au partage de simples joies de la vie. L'ennui est qu'à la fin de chaque sieste et à la fin de chaque nuit, puce avait une partie nouvelle de sa tête sans cheveu.
Puce, âgée seulement de 18 mois, s'est rendue absolument chauve (enfin, avec un simple duvet, pas chauve comme quelqu'un de rasé non plus...).
Que devions nous faire ?
Les mois ont passé, en voyant les spécialistes dont je vous ai parlé un peu plus haut, parfois plusieurs fois chacun.
Le médecin traitant m'a conseillé de lui tondre le peu qu'il lui restait, en me disant que ça devait lui faire très mal de se les arracher, qu'ainsi elle ne pourrait plus le faire du tout, et que du coup, elle oublierait peut être sa manie le temps qu'ils repoussent. Nous avons décidé de suivre ses conseils. Zhom l'a fait. Puce pleurait à chaudes larmes, en tremblant et en se blotissant contre moi. Un moment d'une extrême pénibilité.
Puis le médecin m'a conseillé de tout mettre en oeuvre pour accentuer sa féminité. Je lui ai alors fait percer les oreilles. J'ai acheté des mini élastiques, même s'il n'y avait pas grand chose à attacher, ça lui donnait un air trognon. Elle était folle de joie (voir le sourire sur la photo droite de mon article quand elle s'est vue avec ses élastiques). Je lui ai acheté des bracelets, des colliers, des bagues. Et puis côté vêtement, de toute façon, j'ai toujours aimé l'habiller en robe, en rose...
Puce a maintenant 3 ans et 2 mois. Nous sommes invités chez des amis, il y a beaucoup de bruit. Deux semaines plus tard, nous sommes à nouveau invités chez eux, mais zhom et fiston, bien malades, ne viennent pas. J'y vais donc seule avec puce. La soirée, bruyante, se passe, normalement. Suite à cela, puce est de nouveau "en crise". Par crise, j'entends s'arracher beaucoup de cheveux, du moins, beaucoup plus que les jours "normaux".
Zhom décide de prendre les choses en main. Il parle à sa fille, seul, sans que je sois présente dans la pièce. Je ne saurai jamais exactement ce qu'il lui a dit... Et comme nous avons bien remarqué que c'est quand elle suce sa tétine qu'elle s'arrache des cheveux, nous décidons de l'en sevrer, avec beaucoup d'explications, mais c'est loin d'être simple.
Aujourd'hui puce a 8 ans. Et elle ne s'est plus jamais arracher les cheveux. Elle a eu des moments où elle se les tripotait, des moments où j'en retrouvais quelques uns dans ses draps, mais elle ne n'est plus jamais rendu chauve et elle n'a plus jamais eu de partie dégarnie sur le crâne. Les fois où elle s'en arrachait quelques uns, zhom et moi lui avons parlé, tous les 2. Nous lui avons montré les photos d'elle chauve ou fortement dégarnie. "Tu ne veux pas redevenir comme ça ?" (Puce est très coquette) "Non" "Alors laisse tes cheveux tranquilles"
Aujourd'hui puce a les cheveux longs. Je lui ai bien fait couper au carré quand elle a commencé à se doucher toute seule il y a un an, pour que ce soit plus facile de se les laver , mais c'est tout. Maintenant, on se cantonne aux pointes, de temps en temps. Elle dit même qu'elle voudrait avoir les cheveux de Raiponce. Je suis si heureuse de voir ses beaux cheveux. Un peu déçue qu'elle refuse que je la coiffe, je la laisse les cheveux en bataille alors que ses copines ont des coiffures sophistiquées. La mienne fait quelque peu sauvageonne du coup... M'enfin, elle a des cheveux, et c'est plutôt ça l'essentiel... Dernièrement, je lui ai offert un vanity que j'ai rempli d'accessoires divers pour les cheveux, du coup, elle commence à se coiffer, un peu lol !
Je ne sais pas si le problème de ma fille est vraiment derrière elle. L'avenir nous le dira. Si un jour à l'adolescence elle a une poignée de cheveux en moins, je saurai tout de suite que quelque chose ne va pas dans sa vie...
J'ai tellement pleuré, tellement eu peur que ma fille souffre de cette maladie toute sa vie. J'ai été au bout du désespoir tellement de fois. Aussi, je ne sais pas si une maman concernée par le même problème lira mon article. Mais si j'arrive à lui redonner espoir, alors je n'aurai pas perdu mon temps à écrire. Ne baissez jamais les bras, jamais jamais jamais. Nos enfants ont besoin de savoir que nous sommes là pour eux et que nous les aimons et que nous les soutiendrons toute leur vie, quelques soient les épreuves qu'ils traverseront.
Cet article est pour ma fille. Pour toutes les petites filles, qu'elles soient enfants ou adultes qui souffrent de cette maladie. Et pour toutes les mamans qui ne savent pas comment aider leur enfant. SVP ne baissez jamais les bras. Et aussi pour les petits garçons, car il me semble qu'il y en a.
Merci de m'avoir lue.